CHRONIQUE n° 1 : REFORME DU CODE CIVIL – GENERALITES, POURPARLERS ET AVANT-CONTRATS
Par Romy LORENT, stagiaire, et Me Aïda MOUMNI, avocat associé
L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations fait grand bruit depuis quelques mois.
MDMH AVOCATS a décidé de partager avec vous les grandes lignes de cette réforme, dont les dispositions s’appliqueront aux contrats conclus après le 1er octobre 2016.
Afin de rendre notre exposé plus didactique, la réforme du Code civil fera l’objet de quatre chroniques hebdomadaires relatives :
La présente chronique abordera donc plus précisément la phase des pourparlers et avant-contrats.
L’esprit général qui se dégage des dispositions nouvellement applicables laisse une large place à la liberté des parties, qui ne sont bien sûres pas tenues en principe de contracter quand bien même elles auraient entamé des pourparlers.
Néanmoins, même si la rupture de bonne foi est libre, la rupture fautive est susceptible d’engager la responsabilité extra-contractuelle de son auteur, sauf aménagement conventionnel prévu au préalable par les parties négociantes.
Dès lors, si vous conservez toute liberté pendant la négociation du contrat, attention à ne pas en abuser, le caractère fautif étant apprécié à partir d’un certain nombre d’indices, comme la tardiveté, la mauvaise foi, les frais engagés dans la négociation etc.
Toutefois, en cas de rupture fautive, les avantages inhérents à la conclusion du contrat ou la perte de chance ne sauraient être indemnisés.
Ces règles sont essentiellement la reprise de solutions jurisprudentielles et ne constituent pas une nouveauté réelle.
En revanche le Code civil consacre tout de même un devoir pré-contractuel général d’information relevant de l’ordre public, c’est-à-dire insusceptible de dérogation (article 1112-1 du nouveau code civil), et constitue en cela une réelle nouveauté dans la législation.
Cette nouvelle obligation s’étend aux informations déterminantes « pour le consentement de l’autre », autrement dit si elles ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.
Elle sera opposable seulement dans les cas où l’ignorance de l’autre était légitime ou qu’il faisait confiance à son cocontractant, et ne s’applique pas à l’estimation de la valeur de la prestation.
Toutes les parties y sont soumises et plus seulement les professionnels, et la charge de la preuve incombera d’abord à la partie qui allègue qu’une information lui était due.
Si l’ignorance de cette information est constitutive d’un vice du consentement, le contrat pourra être annulé et la responsabilité pourra être engagée.
Le nouveau code civil vient également préciser et définir les notions d’offre, d’acceptation, de pacte de préférence et de promesse unilatérale.
Les dispositions reprennent pour l’essentiel les solutions jurisprudentielles existantes, dans une volonté de satisfaire les exigences de sécurité juridique.
Concernant les notions d’offre et d’acceptation en premier lieu, le contrat tel qu’il est conçu dans la logique consensualiste dominante en droit français, est une rencontre d’une offre et d’une acceptation.
La définition de ces notions est donc indispensable à la sécurisation des situations juridiques.
Pour être caractérisée comme telle, l’offre doit « comporter les éléments essentiels du contrat » et doit « exprimer la volonté de s’engager » (article 1114 du code civil).
La définition des « éléments essentiels » reste encore à déterminer, notamment en liaison avec l’obligation d’information pré-contractuelle, ce qui sera sans doute l’œuvre de la jurisprudence.
La notion d’acceptation quant à elle reste définie comme la « manifestation de volonté de son auteur d’être lié dans les termes de l’offre » (article 1118 du code civil).
Le code envisage également les possibilités et modalités de rétractation de ces manifestations individuelles de volonté.
Concernant les avant-contrats à proprement parler, le nouveau code y consacre deux articles, respectivement relatifs au pacte de préférence (article 1123 du code) et à la promesse unilatérale de vente (article 1124 du code).
La violation de l’un de ces deux avant-contrats par la conclusion du contrat final avec un tiers ne peut entrainer la nullité dudit contrat que si le tiers était au courant de l’existence d’un avant-contrat et en tout état de cause cette violation sera de nature à engager la responsabilité du contractant ayant violer les termes des avant-contrats qu’il avait conclu.
Ainsi, il ressort de la réforme du code civil s’agissant des pourparlers et des avant-contrats un esprit général de bonne foi et de transparence dans les négociations, afin d’éviter aux parties toute mauvaise surprise.
© MDMH – Publié le 4 octobre 2016