Tout comme la notion d’intérêt à agir, la notion d’actes susceptibles de recours devant le juge administratif est appréciée de manière extensive.
De manière générale, il y a lieu de distinguer les actes susceptibles de recours des mesures d’ordre intérieur lesquelles sont - par définition et parce qu’elles sont « internes » au service - insusceptibles d’être discutées devant le juge administratif.
Ces deux catégories d’actes intéressent tout particulièrement le droit des militaires puisque tout militaire peut être amené à contester un acte ou mesure lui faisant grief émanant de l’autorité militaire.
Il y a lieu de rappeler à ce sujet que c’est par une célèbre décision « Hardouin » rendue par le Conseil d’Etat en date du 17 février 1995 que les militaires ont été autorisés à contester les sanctions disciplinaires qui n’ont plus été considérées comme des mesures d’ordre intérieur. (CE, 17 février 1995, Hardouin et Marie, Rec. Lebon p. 82 et 85)
Toutefois, relèvent toujours de la catégorie des mesures d’ordre intérieur :
- de simples remontrances ;
- de « sévères observations » ;
- ou encore une « lettre de reproche » adressées à un agent (Conseil d’Etat, 6 mai 1953, Thomasset) ;
à la condition que ces actes ne soient pas inscrits au dossier de l’agent, comme le rappelle le Conseil d’Etat ( CE, 25 janvier 2006, M. n°275070).
Enfin, récemment, et ainsi que le rappelle le Conseil d’Etat dans son dossier thématique « le juge administratif, juge de la fonction publique » publié le 2 mai 2017, les critères d’identification des mesures d’ordre intérieur ont été précisés par une décision du Conseil d’Etat du 25 septembre 2015 dans les termes suivants :
« 3. Considérant que les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours; qu'il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération ; que le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable ;(…) » (CE, Section, 25 septembre 2015, Mme.B,n°372624)
Par conséquent, eu égard au recul notable des mesures d’ordre intérieur et au contrôle extensif du juge administratif sur les actes déférés à sa censure, un militaire mécontent a tout intérêt à contester un acte lui faisant grief.
© MDMH – Publié le 4 octobre 2017