Par Soufïa HENNI, Avocat collaborateur et Elodie MAUMONT, Avocat associé
Le Conseil d’Etat a rendu un arrêt intéressant le 14 décembre 2018 concernant le sort réservé aux personnels civils de recrutement local dans le cadre d’une procédure de référé.
En effet, lors de son intervention en Afghanistan, l’armée française a fait appel à de nombreux auxiliaires lesquels ont subi et subissent encore des menaces de mort en raison de leur collaboration.
En l’espèce, un interprète afghan ayant servi pour l’armée française avait sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle auprès des autorités consulaires françaises.
Le silence de l’administration française à sa demande l’a donc contraint à saisir le Juge administratif d’un référé liberté.
Il est à noter que le Conseil d’Etat avait déjà considéré que la protection fonctionnelle s’étendait aux collaborateurs occasionnels du service public notamment dans un arrêt du 13 janvier 2017 qui concernait un informateur de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières.
Dans le cas présent, le Conseil d’Etat a d’une part, conclu à la compétence des juridictions administratives françaises compte tenu des termes du contrat conclu par l’intéressé avec l’armée française et d’autre part, enjoint le Ministre des Armées de mettre en œuvre dans un délai de huit jours toute mesure « de nature à assurer la mise en sécurité immédiate du requérant et de sa famille, par tout moyen approprié, tel que le financement d’un logement dans un quartier sécurisé de Kaboul ».
Ainsi, la Juridiction a relevé une carence des autorités publiques françaises « de nature à exposer M. A, de manière caractérisée, à un risque pour sa vie et à des traitements inhumains ou dégradants ».
En effet, l’intéressé a fait valoir les menaces de mort répétées dont il faisait l’objet étant précisé qu’il avait été blessé par balles puis visé par un attentat.
Aussi, par cette décision, le Conseil d’Etat met l’autorité militaire face à ses responsabilités quant au sort réservé aux auxiliaires auxquels elle a fait appel sur le terrain et qui sont, depuis le retrait des troupes françaises, en danger.
La protection fonctionnelle revêt ainsi plusieurs formes, le Conseil d’Etat ayant considéré dans un arrêt du 4 avril 2011 « que, cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l’agent est exposé, mais aussi d’assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu’il a subis ».
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© MDMH – Publié le 11 janvier 2019