MDMH Avocats avait publié le 25 mai 2018 un article relatif à l'indemnisation des essais nucléaires dans le cadre de la loi du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires.
Pour rappel, cette loi est dite subsidiaire dans le sens ou la demande d'indemnisation au titre de ses dispositions ne peut être formée que dans le cas où aucun régime de pension d'invalidité n'indemnise déjà les conséquences de la maladie subie par la victime des essais nucléaires.
En l’occurrence pour les militaires et leur famille, la loi du 5 janvier 2010 peut leur être appliquée dans le cas où une demande de pension militaire d'invalidité n'a pas été attribuée au titre de la maladie contractée en raison des essais nucléaires visés dans la loi.
L'article 4 de cette loi précisait lors de l’introduction de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 que :
"Aux termes du I de l'article 4 de la même loi : " I. - Les demandes individuelles d'indemnisation sont soumises au comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (...) " En vertu du V du même article 4, dans sa rédaction résultant de l'article 113 de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dont les dispositions sont applicables aux instances en cours à la date de son entrée en vigueur, soit le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel de la République française : " V. - Ce comité examine si les conditions de l'indemnisation sont réunies. Lorsqu'elles le sont, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité (...) "
Ainsi, il était prévu que la victime bénéficiait d'une présomption permettant de relier la maladie contractée avec les essais nucléaires dès lors qu'elle entrait dans les conditions requises par cette loi.
Toutefois, une nouvelle loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 a de nouveau modifié les termes de cet article et ajouté que
" (...)Ce comité examine si les conditions sont réunies. Lorsqu'elles le sont, l'intéressé bénéficie d'une présomption de causalité, à moins qu'il ne soit établi que la dose annuelle de rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français reçue par l'intéressé a été inférieure à la limite de dose efficace pour l'exposition de la population à des rayonnements ionisants fixée dans les conditions prévues au 3° de l'article L. 1333-2 du code de la santé publique ".
Ainsi, une nouvelle condition plus sévère à été ajoutée permettant à l'Etat de renverser la présomption de causalité en apportant la preuve que l'exposition au rayons ionisants a été suffisamment négligeable pour écarter le lien de causalité établi.
cette loi est ainsi plus sévère pour les victimes.
Toutefois, la loi du 28 décembre 2018 n'a pas prévu de dispositions transitoires de sorte qu'elle ne peut s’appliquer que pour les demandes formées après la promulgation de cette loi.
Le conseil d'Etat l'a confirmé dans un arrêt récent rendu le 27 janvier 2020 et a jugé que :
"(...) 3. En modifiant les dispositions du V de l'article 4 de la loi du 5 janvier 2010 issues de l'article 113 de la loi du 28 février 2017, l'article 232 de la loi du 28 décembre 2018 élargit la possibilité, pour l'administration, de combattre la présomption de causalité dont bénéficient les personnes qui demandent une indemnisation lorsque les conditions de celle-ci sont réunies. Il doit être regardé, en l'absence de dispositions transitoires, comme ne s'appliquant qu'aux demandes qui ont été déposées après son entrée en vigueur, intervenue le lendemain de la publication de la loi du 28 décembre 2018 au Journal officiel de la République française.
4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que M. C... a déposé sa demande au CIVEN le 20 octobre 2011. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 et 3 ci-dessus qu'en faisant application des dispositions de la loi du 5 janvier 2010 dans leur rédaction issue de la loi du 28 décembre 2018, alors qu'étaient applicables les dispositions issues de la loi du 28 février 2017, la cour administrative d'appel de Bordeaux a méconnu le champ d'application de la loi. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé (...)".
Pour aller plus loin : article MDMH publié le 25 mai 2018 https://www.mdmh-avocats.fr/2018/05/25/lindemnisation-des-militaires-victimes-des-essais-nucleaires/
Arrêt du conseil d'Etat https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000041485748&fastReqId=1426648056&fastPos=1
© MDMH – Publié le 31 janvier 2020
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