La loi n° 2018-607 du 13juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense a modifié de nombreuses dispositions relatives aux pensions militaires d'invalidité.
Nous avons publié régulièrement des articles s'agissant du transfert du contentieux des pensions militaires d'invalidité (PMI), des tribunaux des pensions vers les juridictions administratives, de même que l'instauration d'un recours administratif préalable et obligatoire (RAPO) qui n'existait pas auparavant.
L'autre modification notable réside également dans le fait que les blessures et maladies contractées par les militaires durant le service bénéficient du régime de la présomption d'imputabilité.
Désormais le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) prévoit que :
« Art. L. 121-2.-Est présumée imputable au service :
« 1° Toute blessure constatée par suite d'un accident, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service ;
« 2° Toute blessure constatée durant les services accomplis par un militaire en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure mentionnée à l'article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national et avant la date de retour sur le lieu d'affectation habituelle ou la date de renvoi dans ses foyers ;
« 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ;
« 4° Toute maladie constatée au cours d'une guerre, d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure mentionnée à l'article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national, à compter du quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant la date de retour sur le lieu d'affectation habituelle ou la date de renvoi du militaire dans ses foyers. En cas d'interruption de service d'une durée supérieure à quatre-vingt-dix jours, la présomption ne joue qu'à compter du quatre-vingt-dixième jour suivant la reprise du service actif. » ;
La loi de programmation militaire du 13 juillet 2018 crée en outre les articles L. 121-2-1 à L. 121-2-3 qui sont ainsi rédigés :
« Art. L. 121-2-1.-Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau de maladies professionnelles mentionné aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale peut être reconnue imputable au service lorsque le militaire ou ses ayants cause établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions.
« Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux précités lorsque le militaire ou ses ayants cause établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions.
« Art. L. 121-2-2.-Est reconnu imputable au service, lorsque le militaire ou ses ayants cause en apportent la preuve ou lorsque l'enquête permet à l'autorité administrative de disposer des éléments suffisants, l'accident de trajet dont est victime le militaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son service et sa résidence ou son lieu de restauration et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel du militaire ou toute autre circonstance particulière, étrangère notamment aux nécessités de la vie courante, est de nature à détacher l'accident du service.
Enfin, l'article L. 121-2-3 énonce :
"La recherche d'imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d'incorporation.
Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. »
Le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) prévoit ainsi un régime proche de ceux des fonctionnaires et agents publics de l'Etat dès que c'est à l'administration militaire de prouver que la maladie ou l'accident ne lui seraient pas imputables dès lors qu'ils ont eu lieu sur le temps de service.
En outre, les maladies professionnelles sont étendues aux militaires et ajoutées au régime des pensions des militaires ce qui représente une avancée notable dès lors qu'il peut être difficile de rapporter la preuve d'un fait précis de service dans ce cas.
Enfin, même en cas d'absence de désignation d'une maladie sur l'un des tableaux des maladies professionnelles, il est également possible d'ne rapporter la preuve par tout moyen.
Un arrêt récent de la cour administrative d'appel de Paris reprend le mécanisme de preuve de l'imputabilité d'une maladie contractée en service et la valeur de la présomption de l'imputabilité.
En effet, afin que la présomption puisse être écartée par l'administration, il ne suffit pas de contester les conclusions médicales mais d'apporter des éléments de preuve tangibles pouvant justifier que les fonctions occupées ne pouvaient pas entrainer la maladie en cause.
Dans ce cas, il s'agissait d'un agent de la poste qui avait contracté une tendinite à l'épaule droite et avait obtenu la reconnaissance de sa maladie comme étant imputable au service par jugement du tribunal administratif de Melun.
La poste a fait appel du jugement ayant fait droit aux demandes de son agent en contestant les conclusions de l'expert médical mais sans apporter de preuve médicale contraire.
La Cour administrative d'appel a rejeté l'argumentation de la Poste en des termes parfaitement clairs à savoir :
"Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.
(...) Ainsi, et alors même que les conclusions de l'expert reposent sur une description approximative du poste de travail, La Poste ne peut être regardée comme critiquant sérieusement et comme apportant des éléments probants et pertinents de nature à contredire les conclusions de l'expert médical selon lesquelles la pathologie dont souffre Mme B... découle de gestes répétitifs effectués depuis plus de vingt ans. Ces conclusions sont, d'ailleurs, corroborées par le certificat médical établi (...) et précisant que " l'ensemble de ces constatations font donc évoquer et préciser la demande de reconnaissance de la pathologie de la patiente en tant que maladie professionnelle pour au moins l'existence d'une tendinopathie chronique non rompue non calcifiante(...)"
Au terme de cette motivation, il est vivement recommandé aux militaires victimes de maladies contractées en service mais dont les demandes sont rejetées par l'administration militaire de former une demande d'expertise judiciaire en vue de se prononcer sur la filiation médicale entre la maladie et le service.
De même, l'ensemble du dossier médical civil ou militaire peut apporter des éléments de preuve suffisants pour obtenir la reconnaissance de l'imputabilité contractée en service.
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Pour aller plus loin : CAA PARIS 18/11/2020 https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000042542708?tab_selection=cetat&searchField=ALL&query=militaire+poste+2020&searchType=ALL&juridiction=TRIBUNAL_CONFLIT&juridiction=CONSEIL_ETAT&juridiction=COURS_APPEL&sortValue=DATE_DESC&pageSize=10&page=1&tab_selection=cetat#cetat
© MDMH – Publié le 2 décembre 2020
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