La fin de l'Etat militaire résultant d'une radiation des cadres pour réforme définitive doit être prononcée d'office par le ministre des Armées ou, pour les gendarmes, par le ministre de l'Intérieur.
L'article L 4139-14 du code de la défense prévoit que le militaire est radié d'office:
"Pour réforme définitive, après avis d'une commission de réforme dont les modalités d'organisation et de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'Etat"
Si tout semble simple et limpide, il s'avère que les militaires reçoivent régulièrement des arrêtés de réforme définitive dont la date est fixée soit à la date de l'avis de la commission de réforme soit à une date bien antérieur à la notification de la décision.
Certes, le militaire concerné se voit concéder un titre de pension de retraite tenant compte de la date de réforme rétroactive toutefois cela engendre nécessairement une durée de services militaires réduite avec à la clé des trop versés de solde et l'impossibilité d'effectuer des démarches dans le civil.
Se pose ainsi la question de savoir si l'administration militaire peut donner un effet rétroactif à un arrêté de réforme et par voie de conséquence à la mise en liquidation de la pension de retraite qui en découle.
Au regard des dispositions de l'article L 4139-14 du code de la défense, la radiation du militaire déclaré inapte définitif ne peut intervenir qu'à la date de la réforme.
Ainsi, si le ministre peut prendre une décision dès l'avis d'inaptitude définitive, il ne peut décider d'une date de réforme qui soit antérieure à cette décision.
Il s'agit ainsi d'une application constante de la jurisprudence administrative qui prévoir que les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, l'administration ne peut, en dérogation à cette règle générale, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, leur conférer une portée rétroactive que dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation
A cet égard le conseil d'Etat a jugé par un arrêt de principe en date du 17 mars 2004 que :
"Considérant toutefois que les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir ; que, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, l'administration ne peut, en dérogation à cette règle générale, leur conférer une portée rétroactive que dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation ; que la décision du 23 mars 2000 par laquelle M. X a été affecté au groupement des personnels isolés de Rueil-Malmaison à compter du 6 janvier 2000 n'était pas nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de cet officier et ne présentait pas non plus le caractère d'une mesure de régularisation ; qu'elle est par suite entachée d'une rétroactivité illégale en tant qu'elle porte sur une période antérieure à son intervention ; que, par suite, M. X doit être regardé comme ayant été affecté au commandement des opérations spéciales jusqu'au 23 mars 2000 ; qu'il a droit, en conséquence, au bénéfice de l'indemnité pour service aériens jusqu'à cette date" .
Ainsi, L'administration militaire ne peut décider d'une date qui lui semble "préférable" mais doit uniquement prendre des décisions pour l'avenir, l'effet rétroactif ne pouvant être autorisé qu'en cas de régularisation d'une situation illégale manifeste.
A cette effet, une telle situation pourrait s'envisager en cas d'expiration des droits à congé maladie sans aucune possibilité de régularisation autrement que par une décision à titre rétroactif.
Toutefois, l'administration militaire peut parfaitement même en cas de renonciation du militaire à ses droits à congé maladie de le placer dans cette position temporairement le temps que la procédure de réforme soit menée jusqu'à son terme.
Ainsi, si une telle situation devait survenir, il y aurait lieu de contester une telle décision de réforme en tant qu'elle n'est pas conforme.
Le code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit également à l'article L 26 que
"La mise en paiement de la pension de retraite ou de la solde de réforme ne peut être antérieure à la date de la décision de radiation des cadres du titulaire sauf dans les cas exceptionnels déterminés par décret en Conseil d'Etat"
A cet effet, l'article R 36 prévoit comme circonstances pouvant justifier une date rétroactive :
"La mise en paiement de la pension de retraite ou de la solde de réforme peut être antérieure à la date de la décision de radiation des cadres lorsque cette décision doit nécessairement avoir un effet rétroactif en vue soit d'appliquer des dispositions statutaires obligeant à placer l'intéressé dans une position administrative régulière, soit de tenir compte de la survenance de la limite d'âge, soit de redresser une illégalité"
Ainsi, le texte prévoit uniquement trois conditions qui pourraient permettre à l'administration militaire de prendre une décision de réforme rétroactive et d'indiquer au service des pensions de retraite de l'Etat une date ne correspondant pas à une date postérieure à la décision de réforme.
Ces dispositions s'imposent tant à l'administration qu'à l'agent.
Ces dispositions sont importantes de même que leurs effets.
En effet certains militaires peuvent être radiés bien longtemps après leur passage devant un médecin militaire puis devant la commission de réforme impliquant parfois que celui-ci ait pu bénéficier d'un indice ou échelon supérieur sans pouvoir en bénéficier du fait de cette radiation rétroactive sans compter souvent l'émission d'un titre de perception réclamant le versement des soldes alors même que le militaire conservait un statut militaire et n'avait aucune possibilité ni de travailler ou de s'inscrire au Pôle emploi donnant ainsi une contrainte supplémentaire au militaire qui n'est pas responsable de la tardiveté du traitement de sa situation administrative.
Là encore, il est possible de contester le titre de pension de retraite en soulevant l'illégalité de la décision de réforme au regard des dispositions légales précitées.
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© MDMH – Publié le 15 juin 2022