C'est encore l'histoire d'un gendarme qui s'était présenté au concours de sous-officier de la gendarmerie.
lors de sa visite d'aptitude, il déclarait avoir contracté auparavant une hépatite B.
Cette affection n'entrainant pas d'inaptitude lorsque la charge virale est très basse, il était classé G=2 et étais admis à suivre sa formation en école.
Lors de son affectation en unité, il recevait une décision dénonçant son contrat d'engagement de 6 ans.
La Cour administrative d'appel de Douai a rappelé par un arrêt rendu le 16 février 223 que l’administration ne peut considérer le militaire inapte de manière infondée et basée sur des faits erronés et non vérifiés.
Le gendarme concerné a été victime d'une erreur de diagnostique grossière et perpétuée par plusieurs médecins militaires.
Lors des contrôles médicaux effectués pour vérifier l'évolution de son infirmité une suspicion liée à une maladie plus grave était décelée. Le médecin spécialiste décidait dès lors de déclarer le gendarme inapte définitif et le classait I =3.
L'intéressé saisissait ainsi la commission des recours des militaires qui décidait au vu du recours formé d'ordonner une sur expertise pour vérifier son état de santé et la réalité de son affection.
Or, le sur expert se contentait de confirmer le dernier avis rendu qui avait conduit à la dénonciation du contrat du militaire sans aucune investigation ni vérification de son dossier médical.
C'est dès lors vers la justice administrative que nous nous sommes tournés.
Après une décision défavorable rendue par le tribunal administratif de Rouen, La cour administrative d'appel de Douai, constatant des incohérences dans les avis des médecins militaires acceptait d'ordonner une expertise médicale sollicitée par MDMH Avocats.
L'expert désigné confirmait que les avis médicaux avaient été relaissés sur la base d'éléments médicaux erronés et que la réalisation de simples analyse de contrôle auraient permis d'éliminer tous les doutes quant à l'état de santé du requérant.
l'expert judicaire confirmait en outre qu'aucun des médecin militaire avaient fait preuve de "légèreté" en s'abstenant d'effectuer les diligences nécessaires pour constater les faits de même qu'il mettait en évidence l'absence d'évolution défavorable de l'infirmité du requérant qui n'avait jamais varié finalement depuis son entrée en école.
C'est sur ce fondement que la cour précise que :
"« Dans ces conditions, le classement au niveau 3 puis 5 pour la rubrique « G » du profil médical « SIGYCOP » de M. D, est erroné puisque l’expert désigné par la cour préconise plutôt un classement en G2 qui n’entraîne pas d’inaptitude.
L’affaire portait sur un militaire ayant signé un contrat d’engagement d’une durée de 6 ans. Il contestait la décision du ministre de l’intérieur portant dénonciation de son contrat d’engagement en raison de sa prétendue inaptitude médicale définitive. Le militaire demandait également sa réintégration dans ses fonctions et le versement d’une indemnité en réparation des préjudices subis du fait de la dénonciation de son contrat d’engagement en qualité de sous-officier de gendarmerie. Il a saisi la juridiction administrative après rejet de son recours préalable par la commission de recours des militaires.
La Cour administrative d'appel a ainsi jugé que:
" Il appartient au juge de l’excès de pouvoir, saisi d’une requête tendant à l’annulation de la dénonciation d’un contrat d’engagement d’un agent recruté pour servir en qualité de sous-officier de gendarmerie et fondé sur son inaptitude physique à exercer cet emploi, non seulement de vérifier l’existence matérielle de l’infirmité invoquée par l’autorité administrative, mais encore d’apprécier si cette infirmité est incompatible avec l’exercice de cet emploi. Si l’appréciation de l’aptitude physique à exercer cet emploi peut prendre en compte les conséquences sur cette aptitude de l’évolution prévisible d’une affection déclarée, elle doit aussi tenir compte de l’existence de traitements permettant de guérir l’affection ou de bloquer son évolution. »
Ainsi, l'administration militaire doit tenir compte dans l'évaluation de l'aptitude de son agent :
La cour administrative d'appel a ainsi annulé la décision dénonçant l'engagement du requérant et a ordonné la réintégration du requérant.
Dans cette affaire nous demandions également l'indemnisation des préjudices subis par le requérant et la Cour y fait droit
« En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu’il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l’illégalité commise présente, compte tenu de l’importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l’encontre de l’intéressé, un lien direct de causalité. Pour l’évaluation du montant de l’indemnité due, doit être prise en compte la perte des rémunérations ainsi que celle des primes et indemnités dont l’intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l’exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l’exercice effectif des fonctions. »
En outre, la Cour a retenu également un trouble dans les les conditions d’existence en raison de l’obligation de trouver un nouvel emploi et de déménagement et plus généralement des conséquences sur l’équilibre familial ainsi qu'un préjudice moral.
Le juge retient également un préjudice moral du fait des conséquences de l'illégalité de la décision.
Encore une fois, le juge administratif tient compte de la réalité des faits pour décider si la décision de l'administration quant à l'aptitude des militaires et gendarme est fondée.
Comme quoi il faut toujours persévérer !
Pour aller plus loin :
voir notre article sur le SYGICOP cliquer ici
voir notre article sur les nouvelles normes d'aptitude médicale cliquer ici