Par Hannelore MOUGIN, élève avocat et Me Aïda MOUMNI, avocat associé
Par un arrêt en date du 10 février 2015, la Cour de cassation s’est prononcée sur la légalité pour un employeur de consulter les SMS de ses salariés contenus sur un téléphone professionnel.
La Chambre commerciale de la Cour de cassation a ainsi jugé dans son arrêt de principe du 10 février 2015, que :
"Les messages écrits ("short message service" ou SMS) envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l’employeur est en droit de les consulter en dehors de la présence de l’intéressé, sauf s’ils sont identifiés comme étant personnels ".
(Cass. Commerciale, 10 février 2015 n°08-42486)
Par cette décision, la Cour de cassation a opéré une harmonisation du régime applicable en matière de nouvelles technologies et plus précisément elle étend aux SMS la même position qu’en matière de courriers électroniques.
La notion de SMS avait déjà fait l’objet d’une première attention par la Cour de cassation le 23 mai 2007 à travers la consécration, par la Chambre sociale, de la recevabilité du SMS en tant que moyen de preuve.
(Cass. Sociale, 23 mai 2007 n°06-43209)
Auparavant, la Cour de cassation a déjà jugé s’agissant des courriers électroniques que les courriers adressés ou reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur, pour les besoins de son travail, sont présumés avoir un caractère professionnel, de sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé.
(Cass. Sociale, 15 décembre 2010, n° 08-42486 ; Cass. Sociale, 19 juin 2013, n°12-12138)
Dès lors, l’employeur pourra consulter voire même collecter les SMS du salarié de deux manières :
- soit à travers l’installation d’un logiciel permettant d’archiver automatiquement les messages envoyés et reçus par les téléphones professionnels de ses salariés, sous réserve d’information préalable auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), le comité d’entreprise (CE) et ses employés ;
- soit l’employeur peut décider de récupérer le téléphone professionnel du salarié et ainsi prendre connaissance de son contenu sans en informer le salarié.
La Cour de cassation semble instaurer un régime de preuve par présomption du caractère professionnel des correspondances électroniques.
Ainsi, afin de protéger la confidentialité des correspondances privées contenues sur un support fourni par l’employeur, ces dernières doivent porter expressément la mention « personnel ».
Dans ces conditions, l’employeur ne pourra les consulter qu’en présence du salarié ou s’il en a été préalablement informé mais, là encore, son accord n’est nullement nécessaire et la jurisprudence opère une appréciation stricte du caractère personnel.
Cependant et ce, contrairement aux courriers électroniques, ou aux dossiers, les téléphones n’offrent pas toujours de champ « objet » permettant d’inscrire la mention « personnel » ce qui rend l’application de cette règle difficile.
En conséquence, il est conseillé d’intégrer le mot « personnel » au début de chaque SMS personnel ou d’identifier au sein de son répertoire téléphonique certains de ses contacts comme étant « personnel ».
Cette jurisprudence n’est pas sans poser problème au regard de la protection de la vie privée…
Le sage retiendra en définitive qu’il est préférable d’éviter, dès que cela est possible, les SMS personnels sur un téléphone professionnel.