Par un arrêt en date du 21 juin 2019, la Cour régionale des pensions militaires d'invalidité de Rennes a annulé la décision de la ministre des armées rejetant la demande de pension de réversion présentée par le conjoint survivant d'un militaire au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre décédé par suite d'un cancer en raison d'une exposition à de l'Uranium appauvri durant son service.
En effet, la Cour retient dans cet arrêt que la requérante rapportait bien la preuve de cette exposition.
Dans cette affaire, la veuve du militaire décédé sollicitait l'octroi d'une pension de conjoint survivant considérant que la maladie de son époux ayant entraîné son décès était lié au service.
Il s’agissait d'un angiosarcome primitif d'origine cardiaque.
Le ministère des armées rejetait la demande de la veuve considérant que la preuve de l'imputabilité au service n'était pas rapportée et a été suivi en cela par le tribunal des pensions de Rennes.
La Cour d'appel de Rennes a retenu une motivation différente en tenant compte du fait que la preuve de l'imputabilité au service peut être rapportée par tous moyens et que la filiation de la maladie permettait de retenir l’existence d'un lien au service.
L'arrêt retient dans motivation que la requérante justifiait bien de la présence de son époux au Kosovo à la suite du conflit armé survenu entre le 6 mars 1998 et le 10 juin 1999.
La cour retient en outre qu'elle justifiait aussi que les munitions utilisées à l'époque provoquaient la libération de particules d'uranium appauvri et de rayons alpha dans l'air et ce de façon irréversible.
la requérante apportait également la preuve que les rapports d'enquête effectués à l'issue de ce conflit par les instances internationales reconnaissaient la toxicité des munitions utilisées et de leur particulière nocivité sur la santé.
L'arrêt retient en conclusion, s'agissant de la qualité de la preuve que : " (...) ces circonstances rapprochées des éléments objectifs fournis par des instances internationales officielles sur l'utilisation massive au Kosovo dans l'année précédent la venue de la victime, d'arme à l'uranium enrichi, substance très toxique et entraînant une contamination irréversible des zones touchées par sa dissémination imposent de retenir que X a été exposé à cet uranium appauvri (...)"
La cour d'appel retient au terme d'une motivation très circonstanciée que le type de cancer dont le militaire était atteint était particulièrement rare et ne pouvait être contracté qu'en raison de maladies génétiques très spécifique ou d'une exposition à de l’uranium appauvri ou à du vinyle monomère.
Le militaire n'ayant aucune de ces maladie ni été exposé à d'autres substance que l'Uranium appauvri durant sa mission au Kosovo, le lien entre le cancer survenu et le service doit être retenu.
Cet arrêt est très positif dans le raisonnement qui est retenu pour les militaires et les conjoints survivants de militaires ayant été exposés durant les essais nucléaires menées par la France au cours du dernier siècle.
En effet, et malgré la reconnaissance par une loi adoptée en 2010 de la responsabilité de l'Etat dans le cadre de la survenance de cancers liés à ces essais et de l'instauration d'une fonds d'indemnisation, la nécessaire preuve d'un lien d'imputabilité exclusif avec le service est une notion trop restrictive compte tenu de la particularité de l'évolution des maladies tels que les cancers.
Dès lors cet arrêt permet de renforcer la position des des militaires et leurs ayant droit concernés dans le cadre de leur demandes de pensions militaires d'invalidité.
© MDMH – Publié le 6 novembre 2019
credit photo : Jens-johnsson--N1_Vhyqd50-unsplash