Souvent improprement dénommée "Loi BRUGNOT" par ceux qui la sollicitent, la jurisprudence dite BRUGNOT permet, ainsi que nous l'avons d'ores et déjà explicité à l'occasion de notre article "Articulation entre PMI et indemnisation complémentaire, jurisprudence Brugnot et faute de l'Etat", de bénéficier d'une indemnitaire complémentaire ayant pour objet de réparer les autres préjudices que ceux de la Pension Militaire d'Invalidité. Jusqu'à présent, cette demande devait être formulée par le demandeur par l'envoi d'un dossier "papier" de demande d'indemnisation. Le Ministère des Armées a lancé l'expérimentation du Portail Indemnisation Complémentaire (PIC) en ce début d'année 2020.
C'est ainsi que, par une note en date du 5 décembre 2019, Madame la Secrétaire Générale du Secrétariat Général pour l'Administration du Ministère des Armées a annoncé l'expérimentation à compter du premier semestre 2020 puis le déploiement au second semestre 2020 sur Intradef "d'un service numérique permettant aux militaires blessés ou atteints d'une maladie en lien avec le service, de déposer de manière dématérialisée, une demande d'indemnisation complémentaire en vue de la réparation de leurs préjudices sur le fondement de la jurisprudence Brugnot (..)."
Annoncé comme s'inscrivant dans le cadre du projet de la Maison Numérique du Blessé et des Familles (MNBF), ce projet a clairement pour buts affichés de simplifier les démarches de ceux qui sont concernés (militaires et ayants droit), de réduire les délais de constitution des dossier et de donner la possibilité aux demandeurs de suivre l'état d'avancement de leur demande.
Dans l'annexe 1 de la note précitée relative aux enjeux et modalités de mise en œuvre du PIC, ile est précisé que le portail "représente un outil de gestion commun à l'ensemble des services instructeurs" des demandes.
Pour autant, si cette initiative apparait conforme aux intérêts des demandeurs en ce que le PIC permettra sans conteste une simplification des procédures, MDMH AVOCATS s'interroge sur son accès et ce faisant sur l'atteinte aux droits des militaires d'être assistés et/ou représentés dans le cadre de leurs demandes d'indemnisation complémentaire.
En effet, en son annexe 1, la note précitée indique :
"Une interface sécurisée et ergonomique à la disposition des demandeurs
Le « PIC » est une interface sécurisée disponible sur Intradef dont l’utilisation est ergonomique et intuitive. Ce mécanisme d’interface est connu des utilisateurs puisqu’ils l’ont en principe utilisé pour constituer leur demande de PMI. Elle permet à chaque militaire blessé ou malade d’initier lui-même sa demande d’indemnisation à partir d’un poste Intradef.
La connexion à ce service numérique requiert l’usage de ses identifiants de connexion habituels (prenom.nom@intradef.gouv.fr et mot de passe associé). Un certain nombre d’informations liées au « compte utilisateur » seront ainsi automatiquement pré-remplies afin de simplifier les démarches du militaire.
Si le militaire n’a pas d’accès à un poste Intradef, il peut se tourner vers un poste Intradef en libre-service (ex : pôle Atlas) au sein duquel une borne sera mise à sa disposition pour ses démarches."
Ainsi, force est de constater que seuls les militaires ayant accès à Intradef ou à un poste en libre service pourront formaliser une demande via le PIC.
Qu'en est il alors des demandes formulées par leurs avocats bénéficiant d'un mandat ad litem ?
Est-il prévu d'ouvrir ce dispositif et Intradef ?
S'agit-il d'une nouvelle restriction apportée à l'accès au droit et aux dispositifs y afférent pour les militaires ?
En effet, il y a quelques semaines, dans notre post "Droit des militaires et accès au droit" nous évoquions les difficultés rencontrées pour l'accès au Bulletin Officiel des Armées.
Près de 2 mois plus tard, l'accès n'a pas été rétabli.
Comment peut-on souhaiter simplifier les démarches des militaires et priver en parallèle leurs conseils d'informations essentielles et des outils de gestion y afférents ?
Crédit photo John SCHNOBRIC pour Unsplash
© MDMH – Publié le 12 février 2020