Les militaires qui souhaitent contester une décision qui leur fait grief doivent porter leur recours devant la juridiction administrative après avoir saisi la commission des recours des militaires (sauf pour les matières qui en sont exonérées)
Les principes qui régissent la procédure administrative en font une procédure essentiellement écrite.
En effet , la procédure devant la juridiction administrative est écrite, contradictoire et inquisitoriale.
S'agissant d'une procédure écrite, cela signifie que les demandes formées par les militaires doivent être faites par écrit dès la saisine du tribunal administratif.
Ainsi, les demandes qui seraient formées par le requérant à l'audience de jugement ne pourront pas être prises en compte.
La procédure est également contradictoire c'est à dire que la juridiction va s'assurer que chaque partie ait pu faire valoir ses arguments.
Enfin, la procédure est inquisitoriale : dans ce contexte, c'est au juge qu'il appartient de diriger l'instruction de la procédure et il pourra formuler des demandes de pièces complémentaires ou d'éclaircissement sur certains point s'il le juge nécessaire.
C'est ce qu'indiquait le conseil d'Etat dans son communiqué de presse du 27 novembre 2020 qui avait décidé d'expérimenter durant 18 mois la possibilité d'instaurer des séances d'instruction orales avant l'audience de jugement afin de permettre de débattre avec l'ensemble des parties sur des questions de fait ou de droit plus particulièrement sur des sujets sensibles.
La volonté exprimée était de permettre aux juges de se rapprocher de la réalité dans le cadre de leur fonction de jugement.
Cette expérimentation ayant été jugée satisfaisante et même prolongée, il a été décidé de généraliser cette procédure à l'ensemble des juridictions administratives.
Ainsi, le décret n°2023-10 du 09 janvier 2023 relatif aux procédures orales a étendu cette pratique à l'ensemble des juridictions administratives
L'article R 625-1 du code de justice administrative prévoit désormais que :
"En complément de l'instruction écrite, la formation de jugement dans un tribunal ou une cour, ou la formation chargée de l'instruction au Conseil d'Etat, peut tenir une séance orale d'instruction au cours de laquelle elle entend les parties sur toute question de fait ou de droit dont l'examen paraît utile. Les parties sont convoquées par un courrier qui fait état des questions susceptibles d'être évoquées. Toute autre question peut être évoquée au cours de cette séance. Peut également être convoquée toute personne dont l'audition paraît utile."
L'article R 625-2 prévoit quant à lui que:
« Art. R. 625-2.-La formation de jugement peut tenir une audience publique d'instruction au cours de laquelle les parties sont entendues sur toute question de fait ou de droit dont l'examen paraît utile. Cette audience ne peut se tenir moins d'une semaine avant la séance de jugement au rôle de laquelle l'affaire doit être inscrite.
« Le président de la formation de jugement convoque les parties par un courrier qui fait état des questions susceptibles d'être évoquées. Peut également être convoquée toute personne dont l'audition paraît utile.
« Les parties ou, si elles sont représentées, leurs représentants peuvent présenter des observations orales à l'audience d'instruction. »
Cette réforme permet ainsi d'introduire plus d'oralité dans les débats et à renforcer la transparence dans le traitement des affaires administratives.
L'instruction orale donne ainsi plus de place à la parole des parties qui pourront débattre des arguments développés dans leur requête et d'approfondir certaines questions de droit et/ou de fait de façon plus exhaustive sans avoir à échanger uniquement par écrit.
Le décret prévoit également que les parties ne peuvent pas être convoquées moins d'une semaine avant l'audience de jugement
Il est regrettable cependant que cette réforme ne donne pas la possibilité pour les parties de faire la demande d'instruction orale. en effet, la rédaction des dispositions précitées laisse à penser que cette instruction orale ne peut se faire qu'à la demande du tribunal lorsqu'il le jugera utile.
Il nous semble toutefois que si l'affaire le nécessite, l'avocat pourra en faire la demande.
Il est également regrettable que le décret ne prévoit pas les modalités de consignation des débats et des échanges qui auront pu avoir lieu lors de l'audience orale d'instruction en réponse aux questions posées par la juridiction.
Cela pourrait nécessiter la rédaction d'un un écrit en sus de l'instruction orale pour s'assurer que tout soit bien enregistré.
Il reste quand même intéressant que le Conseil d'Etat ait jugé utile de faire évoluer la procédure administrative en ouvrant la voie au débat oral qui participe aussi à l'exigence d'impartialité et d'objectivité que toute juridiction doit garantir aux justiciables.
© MDMH – Publié le 19 octobre 2023